Général Joseph de Goislard de Monsabert
Restant toujours dans l’ombre du Maréchal de Lattre de Tassigny, le Général de Montsabert reste néanmoins l’un des officiers français ayant joué un rôle important dans la campagne d’Italie et dans la Libération du territoire national.
Joseph Jean de Goislard de Monsabert voit le jour le 30 septembre 1887 à Libourne au sein d’une vieille famille terrienne aux racines béarnaises et gasconnes. Son futur supérieur, Jean de Lattre de Tassigny le décrivait comme « petit, râblé, avec l’allure d’un cadet de Gascogne ».
Très jeune, il manifeste une vocation pour la carrière des armes. Après sa scolarité secondaire chez les Jésuites du Collège Saint François-Xavier de Vannes, il passe un an au sein du 50e Régiment d’Infanterie puis intègre l’Ecole de Saint-Cyr en 1907 au sein de la « Promotion du Maroc ». Sorti Sous-Lieutenant en 1908, il choisit l’Infanterie et se retrouve versé au 44e RI puis au 3e Régiment de Tirailleurs Marocains en Afrique du Nord. Dès lors, sa carrière d’officier sera presque indissociable de l’Armée d’Afrique.
Lieutenant au 1er Régiment Mixte de Tirailleurs et Zouaves (RMTZ, Lieutenant-Colonel Verrière) de la Division Marocaine du Général Georges Humbert en août 1914, Joseph de Montsabert combat sur la Marne (Marais de Saint-Gond), avant d’être versé au sein du 9e Régiment de Marche de Zouaves (Colonel Couranjou). Au sein de cette unité, Montsabert participe aux combats sur l’Yser, à Verdun, sur le Chemin des Dames, à Coeuvres (1918), à Hangest-en-Santerre et à Parpeville.
Monsabert termine la Grande Guerre avec le grade de Chef de Bataillon, la Légion d’Honneur, la Croix de Guerre et sept citations.
Après la victoire de 1918, Montsabert suit des cours à l’Ecole de Guerre de 1920 à 1922 et devient un spécialiste des troupes d’infanterie nord-africaine. Promu Lieutenant-Colonel en 1932, il sert dans les garnisons de Tadla, Tazla et Blida, avant de recevoir le commandement du 9e Régiment de Tirailleurs Algériens (RTA). Promu Colonel en 1937, il commande la 81e Brigade d’Infanterie à Blida en 1939. Il ne participe pas aux combats de 1940, étant cantonné au sein de l’Armée d’Afrique. Il reste donc sous les ordres des Généraux Weygand et Juin durant deux années, attendant le moment de la revanche. Il reçoit ses deux étoiles de Général de Brigade en 1941.
Lors de l’Opération « Torch », Monsabert prend fait et cause pour le débarquement allié et prépare l’arrivée du Général Giraud à Blida. Déchu de sa nationalité française par le Gouvernement de Vichy, Joseph de Monsabert reçoit néanmoins le commandement des Corps Francs d’Afrique, puis des éléments de réserve du XIXe Corps d’Armée du Général Koeltz. Fin mars 1943, Montsabert reçoit le commandement de la Division de Marche de Constantine très vite rebaptisée 3e Division d’Infanterie Algérienne (DIA) avec laquelle il participe à chasser les Allemands et les Italiens de Tunisie. Montsabert forge alors sa division en s’attirant la loyauté des Tirailleurs d’Algérie et de Tunisie. Il commande ainsi aux 3e et 7e Régiments de Tirailleurs Algériens (RTA), au 4e Régiment de Tirailleurs Tunisiens (RTT) et au 67e Régiment d’Artillerie d’Afrique. Bientôt, la 3e DIA est intégrée au nouveau Corps Expéditionnaire Français (CEF) du Général Juin qui doit participer aux opérations alliées en Italie.
En janvier 1944, Monsabert reçoit l’ordre de Juin de s’emparer du Monte Belvedere conformément aux dispositions offensives prises par le général américain Mark W. Clark. Devant les positions défensives allemandes fermement tenues par la 5. Gebirgs-Division (Division de Montagne) de Julius Ringel, Monsabert fait d’abord savoir à son supérieur qu’une telle attaque – même s’il s’agit d’une diversion – ne sera que suicidaire. Mais les deux hommes savent que ce sont les ordres et le 26 janvier, après un tir de barrage d’artillerie, Monsabert envoie ses trois régiments à l’assaut des pentes du Belvedere. L’assaut est sanglant mais le 4e RTT s’illustre particulièrement en conquérant l’éminence de haute lutte. Profondément humain, Monsabert est durement affecté par le sang versé par ses troupes. On dit même qu’il pleura devant l’état des pertes de sa division.
Néanmoins, le sacrifice de ses hommes permet à l’Armée française d’Afrique d’obtenir l’estime des Américains et des Britanniques.
Après quatre mois de repos et de re-complètement des effectifs, la 3e DIA participe à la percée des Monti Aurrunci en s’emparant de Castelforte et à la victorieuse marche sur Rome. Le 3 juillet, Montsabert et ses hommes entrent les premiers dans Sienne.
En août 1944, la 3e DIA est rassemblée à Tarrente en vue de débarquer en Provence au sein de la Ire Armée Française. Après le 15 août, Monsabert mène sa division au combat dans la libération du Var et des Bouches-du-Rhône. Le 21 août, de Lattre lui donne alors l’ordre de libérer Toulon et Marseille, ce que Monsabert et ses Tirailleurs accomplissent entre les 21 et 28 août en capturant 10 000 prisonniers allemands.
Le 31 août 1944, Joseph de Monsabert laisse le commandement de la 3e DIA au Général Augustin Guillaume pour prendre celui du IInd Corps d’Armée Français. Il mène alors cette grande unité dans poursuite de la 19. Armee allemande et dans la remontée de la Vallée du Rhône, avec la 1re DFL du Général Brosset en tête. Les troupes de Monsabert libèrent donc Saint-Etienne, Mâcon, Chalon-s/-Saône, Autun et Dijon. En novembre, Montsabert mène son unité dans les durs combats des Vosges en coopération avec les troupes américaines de la VIIth US Army du General Alexander M. Patch. Toujours sous les ordres du Général de Lattre de Tassigny et en coordination avec le Ier Corps d’Antoine Béthouart, Monsabert joue un rôle particulièrement actif dans la reconquête de l’Alsace et dans la défense de Strasbourg pendant la contre-attaque de la 1. Armee allemande.
Lors de la campagne d’Allemagne, Monsabert franchit le Rhin avec la Ire Armée française, fonce à travers le Schwarzwald et le Bade-Wurtemberg pour s’emparer de Stuttgart en avril.
En juillet 1945, il reçoit le commandement des forces françaises en Allemagne avant d’être élevé Grand-Croix de la Légion d’Honneur. Ayant atteint la limite d’âge en 1946, il quitte la vie militaire mais entre en vie politique. En 1951, il est élu député RPF (parti gaulliste) des Pyrénées-Atlantiques, mandant qu’il occupe jusqu’en 1955 avant de prendre définitivement sa retraite. Il se consacre aussi à l’écriture en publiant « Il faut refaire l’Armée française ».
S’étant retiré de toute vie publique, Joseph de Goislard de Monsabert s’éteint à Bordeaux le 13 juin 1981 à l’âge de quatre-vingt-treize ans. Il est inhumé à Bordeaux même.
Il était titulaire des décorations suivantes : Légion d’Honneur, Grand-Croix de la LH, Croix de Guerre 1914-1918, Croix de Guerre belge de 1914-1918, Médaille Militaire du Maroc, Croix de Guerre 1939-1945, Croix de Guerre des TOE, Médaille Militaire, Mérite Militaire Chérifien, Military Cross britannique, Bronze Star Medal (Etats-Unis) et Croix de Guerre du Luxembourg.
Entretien avec le Général de Monsabert disponible ici (réalisé par Henri de Turenne et Daniel Costelle) :