30 août 1483 : Mort du Roi Louis XI
C’est après s’être confessé à Saint François de Paule que s’éteint ce grand souverain, laid, avare et superstitieux (né en 1423), fils de Charles VII et de Marie d’Anjou. Jules Michelet a brossé de lui un portrait mêlant admiration et effroi, le comparant à un génie démoniaque.
Toutefois, son œuvre politique nous est connu grâce à Philippe de Commynes qui fut l’un de ses conseillers et son admirateur italien Gianpietro Panigarolla.
Il était surnommé « le Prudent » ou l’ « Universelle Aragne » par ses ennemis et détracteurs.
Durant son enfance, il reçoit une très bonne instruction de la part de ses précepteurs Jean Gerson et Jean Majoris. En 1436, Charles VII le marie à
Marguerite d’Écosse mais cette union déplaît au jeune Dauphin qui ne tarde pas à s’opposer à son père, ainsi qu’à l’influente maîtresse royale, Agnès Sorel (on l’accusera même de l’avoir faite empoisonnée). En 1440, il rejoint Jehan de Dunois et le Duc Jehan II d’Alençon lors de la Grande Praguerie, en fait une révolte de grands féodaux qui refusent le reniement des Bonnes Coutumes par le Roi au profit d’une plus grande centralisation. La Praguerie échoue et Louis doit se réconcilier avec son père, avant de participer à la lutte contre les Anglais. Toutefois, Charles VII lui octroie le Dauphiné. Il participe notamment à la bataille de Pontoise (1441) reconquête de la Normandie et combat courageusement à Dieppe (1449). Il combat aussi Jehan IV d’Armagnac avant de mener les compagnies de routiers en Suisse. A la demande de l’Empereur Frédéric III, il combat les Confédérés qu’il vainc à Pratteln en 1442. Il prend ensuite Bâle où l’antipape Félix V avait été élu. En récompense, le Pape Eugène IV le nomme Gonfalonier (commandant de troupes pontificales) et protecteur du Comtat Venaissin.
De retour dans le Dauphiné, il tente de se reconstituer une clientèle au sein de la noblesse de France, tout en développant l’économie de Grenoble (retour de banquiers juifs) qui devient aussi une capitale provinciale. Mais il recommence à intriguer contre son père peu avant la fin de la Guerre de Cent Ans. Ulcéré par l’attitude se son fils qu’il considère presque comme un traître, Charles VII ordonne au brutal mais efficace Antoine de Chabannes Comte de Dammartin (un ancien écuyer de La Hire) d’aller punir le Dauphin félon dans le Dauphiné. Chabannes monte alors une expédition qui intimide Louis qui obtient d’abord une trêves avant de reprendre le conflit contre son père par libelles. Finalement, il s’enfuit en Franche-Comté, possession de Philippe le Bon Duc de Bourgogne qui lui rend hommage et lui octroie le château de Genappe.
Après la mort de Charles VII, Louis qui n’a pas assisté aux obsèques de son père fait son entrée dans Paris avant d’être sacré à Reims le 30 août 1461.
Après la mort de Marguerite d’Écosse, Louis a épousé Charlotte de Savoie qui lui donnera huit enfants dont seulement trois survivront (Anne de Baujeu, Sainte Jehanne de France et Charles).
Son règne fut marqué par la Guerre de la Ligue du Bien Public (1465-1468) menée par Charles de Charolais dit le Téméraire Duc de Bourgogne et François II de Bretagne, ainsi que par la confrontation qui l’opposa à son cousin Bourgogne pendant près de quinze années. Louis XI prend les armes lors de la Bataille de Montlhéry en 1465 face à Charles le Téméraire et au Comte de Saint-Pol en combattant courageusement au milieu de ses Gardes Écossais. Malheureusement, ce qui s’annonçait comme une victoire éclatante se transforme en bataille aussi confuse que hargneuse en raison de la défection du Duc du Maine. L’Armée royale réussira à repousser l’armée bourguignonne sans complètement l’anéantir. La Guerre de la Ligue du Bien Public est aussi marquée par le siège de Paris qui est un succès défensif pour les Français.
En 1468, a lieu la fameuse Entrevue de Péronne où le Roi de France est joué par le Duc de Bourgogne qui le retient en arguant que Louis XI soutient les Liégeois révoltés contre le Grand Duc d’Occident. Louis doit alors signer un traité l’obligeant à céder la Champagne et plus humiliant, à accompagner Charles le Téméraire à Liège pour le voir mater la rébellion.
Louis XI ne se décourage point et continue d’intriguer contre les ennemis du Téméraire en rusant habilement sur le plan diplomatique. Il réussit ainsi à « encercler » les possessions bourguignonnes en gagnant l’attachement de l’Empereur Frédéric III de Habsbourg, les Cantons Suisses et le Duché de Savoie. Il l’isole même de son principal allié, l’Angleterre d’Édouard IV grâce aux colossales sommes d’or versées à l’issue du Traité de Picquigny.
La guerre contre la Maison de Bourgogne reprend en 1472. Les troupes bourguignonnes et les bandes picardes du Maréchal Philippe d’Esquesdre de Crèvecoeur ravagent les campagnes désertées du nord de la Picardie mais échouent à prendre Beauvais où s’illustre Jehanne Fourquet dit « Hachette ». Charles le Téméraire doit alors replier ses troupes épuisées vers le nord de la France. Le Roi de France retrouve le chemin du succès.
Diplomate rusé et habile négociateur, Louis XI conduit la politique anti-bourguignonne depuis son château du Plessiz-lès-Tours. Il réussit ainsi à isoler Charles le Téméraire et soutint les Cantons Helvètes (Neuchâtel, Uri, Schwyz, Berne, Fribourg, Glaris et Unterwald) dans leur lutte contre le Grand Duc d’Occident. Le résultat escompté arrive à l’hiver 1474, quand après avoir été défait devant les murs de Nancy, Charles de Charolais Duc de Bourgogne est retrouvé mort, à demi-nu et son corps presque dévoré par des loups. Grâce au Traité d’Arras, Louis XI récupère une partie des possessions de Charles le Téméraire, soit la Bourgogne française (Auxerre, Dijon, Beaune), l’Artois et la Picardie.
D’autre part, il négocie en 1475 le Traité de Picquigny avec Edouard IV d’Angleterre, mettant ainsi fin politiquement à la Guerre de Cent Ans. Ceci lui fait dire avec malice et quelque sentiment de revanche : « J’ai plus aisément chassé les Anglais hors du royaume que ne l’a fait mon père ; car mon père les a mis hors à la force d’armes, et je les ai chassés à force de pâtés de venaison et de bons vins ».
Enfin, à la mort dernier fis du Bon Roi René d’Anjou, Nicolas, en 1472, Louis XI met la main sur le Duché d’Anjou qui passe définitivement à la Couronne de France, ainsi que la Provence.
Enfin, autre aspect méconnu de la diplomatie de Louis XI, son attachement particulier à l’Italie le conduira à s’allier durablement avec le Duché de Milan dirigé par la très puissante famille Sforza.
A l’exemple de Philippe le Bel, Charles V et même de son père, Louis XI avait su s’entourer d’hommes de confiance et parfois même de roturiers. Citons entre autres le légiste Jean Bourré, l’impitoyable prévôt Tristan l’Ermite, l’ancien barbier Olivier Le Daim, Philippe de Commynes, Tanneguy IV du Chastel, Robert VII d’Estouteville et Guillaume de Cerisay. Notons qu’à l’exception d’Estouteville et de Pierre de Brézé (avec qui il s’était réconcilié et qui tomba vaillamment à Montlhéry), les anciens conseillers de Charles VII sont écartés sans ménagement, tels Étienne Chevalier, la famille Jouvenel des Ursins ou Jehan de Bueil.
En revanche, il sait être impitoyable avec ceux qui l’ont trahi. Ainsi, le Cardinal Jehan de la Balue qui avait été l’un de ses plus proches conseillers mais qui commit l’erreur d’intriguer en faveur de Charles le Téméraire en 1468, sera-t-il condamné à être enfermé dans l’une des « Fillettes du Roi » (comprendre une cage en fer) au château d’Ozerain jusqu’en 1479, avant d’être sauvé de la condamnation à mort par le Pape Sixte IV.
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