Guerre de Succession d’Autriche, le Royaume de France est allié à la Prusse de Frédéric II et à la Bavière face à l’Angleterre, l’Empire d’Autriche et la Hollande.
Après la déconvenue de Prague, les Armées du Roi Louis XV, alors commandées par Maurice de Saxe, vont affronter les forces anglo-hanovriennes et bataves du Duc de Cumberland, fils du Roi George II de Hanovre.
– La bataille commence tôt le matin,
vers 5h00. La Brigade d’Ingoldsby (12th et 13rd Foot Regiments, Highlanders de Semprill et Hanovriens) tente de s’emparer du village de Fontenoy et sa redoute bien préparée, tenue par les Arquebusiers de Grassin et par la Brigade du Dauphin de Mr. de la Vauguyon. Bien que repoussés en arrière par les canons anglais, les hommes de Monsieur de Grassin tiennent bon la redoute et empêchent les forces d’Ingoldsby de passer.
– Du côté du Bois de Barry, ce sont les Hollando-Hanovriens du Prince de Waldeck et de Cronström (12 bataillons d’infanterie et 12 escadrons en tout) qui tentent de s’emparer de Fontenoy par la droite. Les Hollandais canonnent les positions de la Brigade du Dauphin (Régiments du Dauphin et du Beauvaisis) qui ne répond pas, laissant l’artillerie de Mr. de Chabannes retourner la politesse aux bouches à feu bataves. Les Hollandais s’approchent des redoutes françaises pour se faire accueillir par une formidable mousqueterie. La première attaque est brisée nette. La seconde l’est encore, avec le concours des Brigades Royal (duc d’Avé avec le Régiment Royal et le Régiment du Hainaut) et de la Couronne (Couronne et Soissonais). Les Français n’ont eu que peu de pertes en comparaison des 10 % d’Anglo-Hollando-Hanovriens. Démoralisés, les Hollandais se replient avant de tenter des attaques sans grand entrain.
– Au vu de la puissante artillerie royale, Cumberland fait mettre en avant ses pièces de 6 livres qui bombardent les positions françaises. La première salve tue le jeune Duc de Grammont, commandant des Gardes Françaises. Ce n’est que le début. Monsieur du Brocard, commandant de l’Artillerie royale, fait déplacer lui-même son artillerie sur un angle qu’il juge plus favorable, malgré les mises en garde de son ami Saxe. Du Brocard est tué et beaucoup croient que le Maréchal va défaillir. Mais il se ressaisit et continue d’observer l’avance de Cumberland tout en encourageant ses hommes.
– Le Maréchal de Saxe a réussi à tenir son flanc droit mais la menace vient du centre car le Duc de Cumberland est bien décidé à enfoncer les positions françaises en massant deux colonnes de 7 000 hommes chacune. L’expérimenté Général anglais John Ligonier conseille au bouillant fils du Roi George II la prudence. Mais Cumberland ne veut rien entendre. Il masse sur deux lignes plusieurs éléments des Brigades d’Albermale et de Campbell (11 Foot Regiments, Foot Guards, Coldstream Guards, Royal Welch Fusiliers, Royal Scots Fusiliers, The Buffs, ainsi que les régiments Hanovriens d’Oberz, Campen, Spörden et Zastrow). Cumberland a devant lui la seule Brigade d’Aubeterre (Aubeterre et Courten – Suisse).
– Saxe s’aperçoit que son centre est bien plus vulnérable comparé à son aile droite. Ne pouvant compter sur les très bonnes troupes Grassin et de la Vauguyon, le Maréchal fait venir en trombe la Brigade Irlandaise de Lord Charles O’Brien Comte de Clare et la Brigade de Normandie de Mr. de Talleyrand. Il réussit toutefois à rameuter les Brigades Royal et de la Couronne depuis Fontenoy. La Brigade des Gardes de Mr. de Grammont, l’oncle du jeune duc, (Gardes Françaises d’Anterroches et Gardes Suisses) et la Brigade des Vaisseaux du Comte de Guerchy (Royal des Vaisseaux et Trainel) sont aussi mises en avant face au bélier anglo-hanovrien.
– Alors que la colonne anglaise s’approche des premières lignes française, le Capitaine Charles Hays des Guards, enjoint le Vicomte Joseph Charles-Alexandre d’Anterroches , Colonel des Gardes Françaises, à tirer le premier tout en se servant une rasade d’alcool. Le Colonel français lui aurait donc répondu : « Messieurs les Anglais, nous ne tirons jamais les premiers, tirez vous-mêmes ».
La réponse du Comte d’Anterroches correspond à une ancienne prescription donnée à l’armée de Piémont par le Maréchal de Catinat en 1690 : « il faut essuyer le feu de l’ennemi, attendu que celui-ci est assurément battu quand on a conservé contre lui son feu tout entier ». En effet, le parti qui tirait le premier se trouvait désavantagé, car pendant le temps forcément assez long qu’il mettait à recharger ses armes, l’ennemi pouvait impunément se rapprocher et tirer de beaucoup plus près, avec de bien meilleurs résultats.
Le bélier de Cumberland a fait voler en éclat la première ligne française avec 266 tués aux premières salves. Aubeterre, Courten, Hainaut, Royal et la Couronne se sont replacés en arrière pendant que les Gardes Françaises et les Suisses se sont regroupés derrière la redoute de Chambonas. Maurice de Saxe envoie immédiatement la Brigade de Normandie de Talleyrand, la Brigade des Vaisseaux de Guerchy, ainsi que le Bataillon d’Eu.
Le Maréchal de France décide donc de contre-attaquer la « colonne infernale » avec sa cavalerie. Trois escadrons des régiments Colonel-Général, Brancas, Clermont-Prince, Fitz-James et Fiennes (Irlandais) et Royal-Cravates se lancent dans une première charge. Certains officiers haranguent leurs hommes en ces termes : « Messieurs, assurez vos chapeaux, nous avons l’honneur de charger ! » Cette charge échoue face au mur de feu anglais, mais elle est immédiatement suivie d’une seconde lancée par les Royal-Etranger, Chabrillan, Brionne, Pons, Berry, Penthièvre et Noailles. La fine fleur de la noblesse française en fait partie : Noailles, Estrée, Voyer d’Argenson et le Chevalier d’Apcher qui fait son rapport à Louis XV, malgré son pied broyé. Mais la seconde charge n’a pas plus de succès malgré toute l’impétuosité de la cavalerie française.
Cependant, les Gardes Françaises, les Suisses de Courten, Aubeterre et le Régiment Royal des Vaisseaux se ressaisissent et durcissent leur résistance malgré leurs pertes. La Brigade Irlandaise de Lord Clare intervient elle aussi en soutien mais sa première attaque échoue. Louis XV fait aussi donner la cavalerie d’élite de la Maison Royale (Gardes du Corps, Gendarmerie, Chevau-légers et Grenadiers à Cheval) commandée par le Duc de Richelieu, ainsi que les Carabiniers de Montmorency. Le Roi doit aussi retenir son fils le Dauphin qui voulait se lancer dans le combat. Les Français se lancent en masse sur les rangs anglais qui crachent leur feu à dix pas, forçant les cavaliers de Louis XV à tourner bride.
– Cumberland croit tenir sa victoire mais il oublie que sa colonne perd de la cohésion face aux Brigades françaises et surtout, que sa cavalerie (Household , Brigades de Hawker et de Campbell) est restée en arrière. Ajoutons aussi, que le général Campbell, l’un de ses meilleurs subordonnés, meurt de ses blessures. Côté français, le Régiment suisse de Courten est lui aussi endeuillé par la mort de son chef, le Lieutenant-Colonel Nicolas Marclesis.
Après un conseil de guerre, Maurice Saxe change la disposition de ses forces en déployant les régiments de la Brigade Irlandaise (Clare, Bulkeley, Dillon–Infanterie, Berwick, Rooth et Lally) entre la redoute de Chambonnas et le Bois de Barry. Il redéploie ensuite son artillerie.
– La colonne de Cumberland avance toujours lentement dans le dispositif français. Mais Louis XV et Saxe font donner leur artillerie qui tire à mitraille et troue impitoyablement les rangs anglo-hanovriens. Saxe aligne ensuite la Brigade Irlandaise, la Brigade de Normandie (dont le Colonel Mr. de Talleyrand vient d’être tué et remplacé par Mr. de Salvency) et la Brigade des Vaisseaux, sous le commandement de son meilleur second Ulrich Woldemar de Lowendal qui mène la contre-attaque.
Les Irlandais (même si l’on comptait autant d’Écossais, que d’Allemands et de Français dans leurs rangs) – les Wild Geese (Oies Sauvages) – de Lord Clare s’élancent ensuite au cri de « Remember Limerick ! » et engagent férocement les rangs anglais au sabre à la baïonnette. Le Colonel Dillon sera aussi tué à la tête de son régiment. L’élan des Irlandais est contagieux, la Brigade de Normandie de Salvency et le Régiment de Vaisseaux pourtant étrillé, se joignent à l’assaut. C’est d’ailleurs le Capitaine Bonafousse (Normandie) qui pénètre le premier dans la colonne ennemie. Et c’est presque toute l’armée du Roy qui se retrouve sur les rangs anglais, Maison du Roi, Carabiniers de Montmorency, Brigades Prince-Camille, de Berry, de Noailles, Clermont-Prince, etc. Les Irlandais se couvrent de gloire. Le Lieutenant Mac Mahon (Clare) et l’Aide-Major Kennedy (Bulkeley), épaulés par vingt hommes enlèvent quatre canons aux anglais, pendant que le Sergent Wheelock s’empare d’un drapeau (il sera fait Lieutenant par la suite).
Voyant ses premiers rangs se faire littéralement écrasés, le duc de Cumberland comprend que la retraite est inévitable. Il avait d’ailleurs dit avant la bataille : « Je marcherai sur Paris ou je mangerai mes bottes ». Selon certaines sources (Ligonier et Mansart), la retraite des unités les moins engagées se fait en bon ordre.
– Il n’en reste pas moins que malgré les pertes, Fontenoy est une grande victoire pour la France. S’agenouillant au pied de son Souverain, le Maréchal de Saxe déclare : « Sire, j’ai assez vécu, je ne souhaitais vivre que pour voir Votre Majesté victorieuse », avant d’ajouter : « Vous voyez à quoi tiennent les batailles… ». Et Louis XV dit : « Tout vient de Dieu et de Maurice de Saxe »
Sources :
– Pierre Gaxotte : Louis XV, Fayard
– Denis Gandilhon, Fontenoy. La France domine l’Europe, Histoire et Collections